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Où tremblent des mondes
Poète, tu es celui qui ne veut pas tenir de place.
Petit lit dans la chambre trop peuplée
Silence de la lecture
Plus tard silence de l’amour.
Tu as croisé des gens tonitruants
Qui n’ont jamais douté de leur légitimité
Qui exigent et qui puent en toute souveraineté.
Tu as choisi le livre le plus dépenaillé
Sans couverture ni nom d’auteur
Et en as fait ta Brocéliande.
Tu t’es fabriqué des disques de carton
Que tu faisais jouer dans ta tête capitonnée.
Tu as déroulé, entre deux bâtons,
Des cinémas peints sur cellophane.
Tu as fait tenir ta littérature
Sur des bouts de papier
De petits carnets grignotés sur la vie que d’autres te prenaient.
Tu t’es laissé envahir par ce que d’autres construisaient.
Mais enfin !
Quand vas-tu oser ?
Ose la tendresse de ton regard sur le monde
Ose tes images.
Ose ta musique.
Mêle ta voix aux chœurs des prophètes
De ceux qui voient et disent
Avant que demain advienne.
Le Haïku est miette
Que seul l’oiseau convoite.
Offre aux hommes la moisson abondante
Que leurs yeux atrophiés ne peuvent percevoir.
Illumine pour eux des champs
Dresse des arbres et des montagnes
Fais rugir le tonnerre.
Garde pour Dieu la simple goutte
Où tremblent des mondes.
Hélène Aribaut
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